La lettre volée

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Joffrin perd la main

Dans un Rebonds de Libé, ce matin, Joffrin confirme sa totale déconnexion d'avec le monde réel.

Il veut en effet "Réfuter la Bayrou attitude", en un article qui se veut respectueux du vote Bayrou mais passe à côté.

D'abord, il ne s'agit pas d'une attitude : c'est refaire aux électeurs de Bayrou le coup du mépris réservé aux nonistes en 2005. Joffrin suppose, comme le faisait remarquer un commentateur sur je ne sais quel blog, que Bayrou est une marque, un produit, pour lequel une bonne campagne de pub aurait permis un succès fugace et trompeur.

Donc, seuls les centristes ont le droit de voter Bayrou, les électeurs de droite et de gauche ne doivent pas sortir des clous : "si vous êtes de droite ou de gauche, votez selon vos convictions, pour votre famille politique. Au moins le scrutin sera-t-il sincère".

En effet, le programme de Ségolène, pour les gens de gauche, serait "plus social". Moi, je me souviens de ce qu'écrivait Jacques Julliard, dans Libé également, il y a une dizaine de jours : "Ségolène a changé cela: madame 20 euros a tenu d'emblée un discours socialement de gauche et économiquement de droite, selon le voeu de sa nouvelle clientèle." Je ne crois pas que l'on puisse avoir un programme économique de droite et social de gauche.

C'est se moquer du monde que de croire que des mesures sociales trouveront un financement correct avec une politique économique de droite. Je laisse Julliard se dépatouiller avec ce programme pour le moins hétéroclite ; je retiens que de l'avis même des ségolistes, Ségo a un programme que l'on ne peut que difficilement qualifier de "de gauche".

Joffrin s'enfonce ensuite en expliquant que Bayrou, Ségo et Sarko, finalement c'est bonnet blanc et blanc bonnet puisque tout le monde emprunte à tout le monde. Dans ce bazar, la seule planche de salut, comme un mât brisé qui flotterait à grand peine, c'est le clivage droite/gauche. Ouf, je dis clivage droite/gauche et la terre ferme enfin s'offre à mes pieds.

Quelle blague !

La réalité, M. Joffrin, c'est que la mondialisation amplifiée/répercutée par le jeu européen laisse très peu de marges de manoeuvres à un(e) président(e) de la République, quel qu'il soit.

Autant en prendre acte et voter pour celui qui annonce la couleur. Savoir que ce geste me sera pardonné par M. Joffrin si je daigne m'appeler "centriste", ou me sera reproché si je me dis "de gauche", me laisse finalement de marbre.

Il se trouve que de 1988 à 2002 (deuxième tour exclu...), j'ai voté exclusivement PS. Je devais être un centriste égaré. C'est grave M. Joffrin ?




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A
"Dans un Rebonds de Libé, ce matin, Joffrin confirme sa totale déconnexion d'avec le monde réel.Il veut en effet "Réfuter la Bayrou attitude", en un article qui se veut respectueux du vote Bayrou mais passe à côté."***Je n'ai pas une immense admiration pour sieur Joffrin, mais j'ai noté qu'il avait un certain flair. Réfuter (ou refuser) la "Bayrou attitude" me parait frappé au sceau du bon sens, pour le moins. http://antennerelais.canalblog.com/archives/2007/03/23/4398229.html
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E
Cher Monsieur Antennerelais, vos commentaires parfaitement unilatéraux et renvoyant sur votre propre blog ne constituent pas le genre de dialogue que j'apprécie d'avoir, y compris avec des lecteurs ayant des opinions opposées aux miennes.Sachez qu'à l'avenir j'effacerai sans regret vos commentaires de la même farine. A la limite, si vous voulez signaler vos billets, utilisez le trackback.
F
Edgar,<br /> Tu as raison : par "libre-échangistes", je voulais souligner leur haine concomittante de tout ce qui est du secteur public (une des raisons profondes de mon "NON" à l'Europe des marchands ploutocrates).<br /> Mais je trouve excessivement optimiste de croire "qu'il saura se montrer attentif aux excès du libéralisme" : par rapport aux socialistes (pour qui je ne voterai pas au 1° tour), j'ai bien peur qu'il soit aussi mollasson.<br /> Le programme de Bové (pour qui je ne voterai pas non plus au 1° tour), c'est celui de la gauche "unitaire" (défense de rire), porté également par Buffet, et dans une moindre mesure par Besancenot.Il est là : http://www.alternativeagauche2007.org/spip.php?article382<br /> Mais dans le fond, je partage beaucoup de tes propos sur Bayrou (et ça chiffonne mon atavisme rouge et anticlérical multiséculaire).
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E
j'aime bien que Bayrou précise, à propos des crèches qu'il entend construire plus largement, qu'il ne s'agira pas de "crèches d'entreprises" : il y a au moins une personne dans son équipe qui a réfléchi à la question cinq minutes, et qui a trouvé une position humaine.C'est vrai qu'on finit par ne pas en demander beaucoup...
X
Mon cher Edgarpassant devant chez vous, je ne résiste pas au plaisir de vous proposer un petit appendicule où loger la citation qui décore votre façade, afin de  lui donner toute sa saveur. Voilà, tiré du JO de l’Assemblée nationale,  ce qui la précède immédiatement dans l’intervention de PMF du 18 janvier 1957:“L’Allemagne est un bon client, par exemple, pour nos exportations agricoles, mais l’Angleterre peut nous acheter beaucoup plus encore si nous savons prendre une place plus large sur son marché. En fait, l’Angleterre est le premier importateur du monde pour la viande, les céréales, les corps gras.Toute formation qui nous éloigne de l’Angleterre diminue nos chances de pénétrer sur ce marché qui peut être l’un des plus lucratifs pour nos exportateurs, surtout agricoles.Dès lors, on comprend mal les réticences qui accueillent le projet de zone de libre échange à laquelle l’Angleterre participerait et cette priorité jalouse accordée à une organisation volontairement limitée à l’Europe des Six.Enfin, pour en revenir au fond, le projet de marché commun etc...”Perspicace et magnanime , non?Et la phrase suivante? La voilà:“...théorie classique de la résignation. En fait, la concurrence qui s’instaurera dans le cadre du traité tel qu’il est aujourd’hui - mais je veux croire qu’il est encore perfectible- n’assurera pas le triomphe de celui qui a, intrinséquement, le meilleure productivité, mais de ceux qui détiennent les matières premières ou les produits nécessaires aux autres, des moyens financiers importants, des productions concentrées et intégrées verticalement, de vastes réseaux commerciaux et de transports, de ceux aussi qui ont les moindres charges sociales, militaires, et autres”.Extra-lucide, vous ne trouvez pas?Et je vous passe les plombiers polonais et allemands, car ils sont bien là eux aussi, comme le risque de “mettre gratuitement ou presque” nos belle colonies (Togo, Maroc, Afrique noire)  pour lesquelles nous avons “versé tant de sang et dépensé tant d’argent”  “à la disposition de nos concurrents étrangers”...Fermez le ban.
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E
Cher et aimable M. Delcourt,Ne traînez pas trop ici, l'atmosphère y est méphitique. On y dit du mal de la Commission, de la merveilleuse stratégie de Lisbonne et des récentes hausses de taux d'intérêt concoctées par Francfort.Votre citation est très intéressante, et je ne vois pas très bien en quoi elle ferme le ban, sinon sur une position qui me va fort bien : PMF préférait un grand marché à des noyaux durs à forme étatique.Ceci dit, je suis toujours à la recherche d'un ouvrage détaillé et intéressant sur la position européenne de PMF, qui n'a pas l'air très documentée (ce que je retiens d'une lecture ancienne de sa bio par Lacouture est très mince).Salutations,Edgar
J
Que de vide dans la tribune de Joffrin !<br /> En la lisant, j'ai eu l'impression que Joffrin s'amusait à appliquer en politique les concepts développés par Pierre Bayard dans « Comment parler des livres que nous n'avons pas lu ? Eloge de la non-lecture ».
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F
Quand j'entends Joffrin se dire de gauche, je me marre ! Je ne suis pas de la même gauche que lui, en tout cas. Voir par ici par exemple : http://www.acrimed.org/article2585.html<br /> PS (à propos de la gauche, du centre, de la droite, du brouillard...) : ça ne vous dérange pas, Edgar, que parmi les conseillers économiques de M. Bayrou figurent M. Camdessus (ex. Président de la Banque mondiale de 1988 à 2000, la belle époque) et M. Peyrelevade (ex. fossoyeur -au sens propre- du crédit lyonnais), sans compter M. Lamy (directeur général de l'OMC), dont M. Bayrou a dit qu'il voulait en faire son Premier Ministre : ces trois là sont furieusement libre-échangistes, jusqu'au bout des ongles (je m'adresse au noniste, là). Je vous épargne, vu sa faible notoriété, qu'il est également soutenu par M. Fillias (ex. candidat aux présidentielles), un ultralibéral qui veut supprimer les impôts et le code du travail.<br /> C'est pour ce genre de trucs que je me méfie énormément de M. Bayrou, et que je ne risque pas de voter pour quelqu'un qui entretient le flou à ce point là sur son positionnement réel. Au-delà de son discours, certes séduisant, M. Bayrou n'est-il pas aussi enfumeur que les autres ? <br />  <br />
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E
Mais moi je n'ai pas grand chose contre le libre-échangisme ! Je ne crois pas à un protectionnisme autre qu'une défense assumée de ses intérêts. Les USA savent très bien faire du protectionnisme à peine déguisé derrière une politique globalement libre-échangiste.Je crois plus à la défense des services publics, qui ne sont pas normalement menacés par le libre-échange, sauf dans la vision AMI/OMC/Europe de la chose.Ce n'est pas parce que Lamy, Camdessus et autres sont des hypocrites (ie. qu'ils nient que leur conception du libéralisme est l'enterrement d'une tradition française de services publics forts), qu'il faut jeter le libéralisme et le principe d'un libre échange.Savoir si Bayrou est un enfumeur, on verra bien à l'usage. Il y aura de toute façon les législatives, dès juin, pour corriger le tir si nécessaire.Ceci dit, on a donné Lamy comme Premier ministre de Ségo aussi, et a priori il est PS, pas UDF.Le choix alternatif à Bayrou serait plutôt Bové, mais d'une part je n'ai pas lu son programme, et d'autre part je trouve étonnant qu'on viole la loi républicaine pour ensuite se présenter à la présidentielle.D'accord avec toi, Bayrou n'est pas forcément le choix de l'enthousiasme, mais je crois qu'il saura se montrer attentif aux excès du libéralisme, peut-être dans une inspiration de paternalisme chrétien, mais il y a sans doute pire.
V
"La réalité, M. Joffrin, c'est que la mondialisation amplifiée/répercutée par le jeu européen laisse très peu de marges de manoeuvres à un(e) président(e) de la République, quel qu'il soit."Exactement, c'est précisément pour cela qu'il faut un pouvoir politique européen désigné démocratiquement et non pas un praesidium de chefs de gouvernement qui se réunit de temps en temps. C'est pour cela aussi qu'il faut un président qui ait un véritable engagement européen et qui ne fasse pas le guignol en se déguisant en Marianne drapée dans un drapeau tricolore.
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