6 Janvier 2009
La crise de la démocratie pointée par Todd équivaut à une situation d'anomie : plus de normes communes, de références valables pour l'ensemble ou pour des grands groupes au sein de la population. La crise de la religion est la première cause de ce vide selon Todd. Cette crise entraînerait d'abord la disparition de l'ancienne démocratie chrétienne à la française (MRP, puis UDF), et par contrecoup, touche le PCF, qui s'appuyait, pour vivre, sur cet ennemi traditionnel.
Pourquoi pas ? Mais Todd ne cesse de mêler l'anecdotique à des considérations de long terme, si bien que son raisonnement, impressionniste, ne convainc pas réellement. Ses anecdotes sont parfois fort bien vues (ainsi de l'idée que les quatre candidats les plus sérieux de la présidentielle de 2007 étaient tous de droite, de Le Pen à « une candidate de droite loufoque, socialo-traditionnaliste, Royal. »), mais n'ont qu'un rapport vague avec la thématique du chapitre.
Todd fait siennes les analyses qui veulent que l'homme sans Dieu soit, au fond, voué à perdre tout repère (« l'incroyant semble ne se sentir bien dans sa certitude que s'il y a encore dans la société une Eglise, minoritaire, mais porteuse d'une croyance positive en l'existence de Dieu, qu'il peut critiquer et nier ».) De là à en conclure que « à la course au vide des partis correspond une chronologie complexe qui ne révèle finalement qu'un élément sûr : le caractère primordial de la décomposition religieuse, de la foi comme de la pratique, qui entraîne à sa suite celle du champ politique ». On est donc loin d'être convaincu par les quelques analyses avancées.
Les raccourcis hasardeux parsèment de toute façon l'ouvrage et le premier chapitre n'est pas épargné. Par exemple, ce savoureux détail sur la France, où « la vie sexuelle des individus, plus expérimentale et variée qu'autrefois, certes, produit, au final, un indicateur de fécondité parfaitement satisfaisant de deux enfants par femme »... Y a-t-il un lien de cause à effet ? Sans doute sera-ce le sujet du prochain opus...
Pour finir tout de même sur une note positive, Todd explique que la crise du religieux affecte tout autant l'Islam en France que les églises chrétiennes, et que le choc des civilisations annoncé par Huntington résulte tout bêtement d'une réaction aux politiques agressives et impériales des Etats-Unis. Je pense d'ailleurs que le « rendez-vous des civilisations », autre ouvrage de Todd, est sans doute plus intéressant qu' « après la démocratie », peut-être parce qu'il ne l'a pas écrit seul.
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