La lettre volée

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Une pétition que je ne signerai pas...

Aujourd'hui pas d'Europe, j'ai une indigestion, mais je reste EN GREVE



Ces derniers temps j'ai appelé à en signer beaucoup,  mais je ne signerai pas la pétition qu'Amazon organise pour poursuivre sa livraison gratuite, après avoir reçu un mail d'Amazon m'appelant à la mobilisation.

Economiquement, c'est une entorse à la loi Lang, point barre. Lorsqu'Amazon offre les frais de livraison, alors que vraisemblablement le transporteur ne lui fait pas cadeau des frais d'envoi, ça veut dire que c'est le prix du livre qu'Amazon réduit, de façon dissimulée.

Et c'est une atteinte claire à la loi Lang, pas trop la peine d'y revenir. Ou alors il faut dire clairement que la loi Lang n'est pas bonne. Or les petits libraires n'ont pas les moyens de faire de telles promotions.

Je commande régulièrement sur Amazon, notamment mes doses de polars, sur amazon UK, mais je partage entièrement les protestations de Irène Lindon et Françoise Nyssen, dans le courrier des lecteurs du Monde d'hier (que je repompe ici, de toute façon le Monde n'a pas l'air d'inclure le courrier des lecteurs dans ses archives).

Et je ne crois pas, face aux protestations des acheteurs en ligne, que l'on puisse être aisément attiré par un livre sans l'avoir touché, parcouru, feuilleté.

Moins de librairies, ce serait, à coup sûr, moins de livres vendus.


 

Pour la librairie

En attaquant la librairie sur la question des frais de port dans Le Monde du 19 janvier, en traitant les libraires de poujadistes, de lâches qui s'enrichissent grâce à leurs remises et sans prendre aucun risque puisqu'ils peuvent retourner leurs invendus, Thierry Wolton se trompe, bien qu'il adopte un point de vue malheureusement partagé par nombre de consommateurs, pour qui le livre se réduit aux titres dont on parle dans la presse et les médias, ceux qui composent les listes des meilleures ventes et se vendent facilement pendant un temps, puis sombrent dans l'oubli.

Ils sont loin d'être honteux ni négligeables, ces titres-là. Tous les éditeurs se réjouissent de les publier et tous les libraires de les vendre, du plus petit au plus important, y compris, bien entendu, les sites Internet, dont Amazon n'est pas le moindre et qui, pour cette raison, peut ne pas facturer le port dans les commandes qu'il sert. Cela permet de faire du livre un produit d'appel, le temps de se débarrasser des libraires moins riches qui ne peuvent faire face. Pour autant, il n'est pas sûr que ces livres enrichissent le patrimoine.

En revanche, il existe un nombre considérable d'ouvrages qui n'ont pas cette destinée parce que, pour les remarquer, il faut les avoir lus et avoir pris du plaisir à s'interroger sur les questions qu'ils posent - que ce soit en littérature ou en non-fiction. Ceux-là, on les découvre grâce à la vitrine d'un libraire, à leur exposition sur les tables, qui permet au lecteur intéressé de les feuilleter, voire d'en parler avec le libraire qui a pris soin de les recommander. Ouvrages qui, sans cela, n'auraient pas eu la moindre existence. Mais qui peuvent, grâce aux libraires, parvenir ensuite sur des sites en ligne.

C'est la librairie de qualité et elle seule qui est en mesure de proposer un choix d'ouvrages que personne n'attend et qui, s'ils sont rarement rentables, font l'honneur d'une profession. Sans ce travail des libraires, bien des ouvrages de qualité ne pourraient être publiés ou ne le seront plus.

Alors, dans dix ans, quand on s'interrogera sur le retard intellectuel de la France, certains regretteront sûrement ces libraires qui menaient un combat d'arrière-garde en défendant la culture.

Irène Lindon                                     Françoise Nyssen

PDG des Editions de Minuit

                                                        PDG des Editions Actes Sud
 


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E
je le savais, tu es de droite !
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V
Où est le lien pour aller signer ?
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