La lettre volée

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"Des milliers de billes qui roulent partout" : la France de 2013

la renonciation à l'identité est une défense contre l'anéantissement. Être compris ("identifié") comporte le risque de destruction [...] certains patients cherchent à se protéger contre la destruction absolue en devenant incompréhensibles, et, donc, inidentifiables au point de manquer d'identité réelle.

 

Propos d'un patient souffrant de ce mal identitaire :

"Il y a ici un monstre menaçant (=le psychanalyste) qui veut me détruire. Pour lui échapper, je m'effrite et me transforme dans des milliers de billes qui roulent partout. Il y en a tant que le monstre n'arrivera jamais à les retrouver et à les détruire toutes ; ainsi j'éviterai la destruction totale".

 

Georges Devereux.

La renonciation à l'identité. Défense contre l'anéantissement.

 

Analogie rapide, brutale et bloguesque : en juin 1940, la France a connu le gouffre. Peut-être la défaite la moins attendue et la plus brutale de son histoire. Depuis, elle s'enfuit : sur les routes européennes, dans une amitié franco-allemande fantasmée, dans une décentralisation la plus absurde possible (à propos de Lyon, métropole européenne, j'avais évoqué la pulvérisation d'un état nation. Poudre ou bille, c'est pareil : insaisissable), dans une jouissance d'anorexie austéritaire.

Surtout, ne jamais s'arrêter, ne jamais se retourner.

A tel point que le défenseur d'une vision de l'identité française la plus plate, la plus renfermée, Jean-Marie le Pen, devient comme le monstre menaçant, le psychanalyste, qui rappelle au patient anéanti qu'il a été, qu'il est encore, qu'il le veuille ou non.

Nous méritons mieux. Et comme psychanalyste, et comme identité !

 


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E
<br /> davidon : merci. l'étrange défaite est un livre à lire absolument en effet !<br />
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D
<br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> lecteur silencieux de votre blog, je tenais aujourd'hui à saluer votre travail qui  permet d'enrichir mes connaissances et approfondir mes nombreuses interrogations sur l'union européenne<br /> notamment. (je viens il y a peu d'adhérer à l'UPR).  Merci aussi pour le lien  posé dans votre commentaire (le livre semble très intéressant ), excellent article !<br /> <br /> <br /> Je serais tenter d'écrire fort naïvement que l'Histoire se répète.<br /> <br /> <br /> Merci et continuez !<br />
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F
<br /> En face de Jérôme Ferrari il serait bon de mettre Aldo Schiavone, "L'histoire brisée" et le n°27 de Raisons politiques, La démocratie peut-elle se passer de fictions?<br /> (2007) <br />
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J
<br /> N'est-ce pas par manque d'amour, oui d'amour, et d'abord chez ceux qui "pensent", que se révèle, en plein ou ou creux, la démangeaison identitaire ?<br /> <br /> <br /> Personnellement, je n'ai pas de définition de l'identité française et n'en ai jamais cherché.<br /> <br /> <br /> Ayant beaucoup voyagé, il m'a été donné,  ce qui peut s'assimiler à une chance, d'aimer cet objet, assurément baroque, qu'on appelle la France et qui parait bien moins moisie que sa<br /> représentation habituelle, vue des antipodes.<br /> <br /> <br /> C'est peut-être que je n'exécute pas mes pères chaque matin, rituellement, comme on fait ses ablutions, en remontant 20 générations, jusqu'aux croisades, à la St Barthélemy etc (les listes<br /> d'horreurs ne sont jamais exhaustives).<br /> <br /> <br /> Sans doute ai-je préféré à ces exercices expiatoires la lecture de Jean Bodin, d'Anna Arendt, de Jaurès, de Charles de Gaulle et de quelques autres.<br /> <br /> <br /> Une recommandation à M. Filippi qui pointe à juste titre le galimatias littéraire : Jérome Ferrari. Sermon sur la chute de Rome. On a lu pire.<br /> <br /> <br />  <br />
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E
<br /> <br /> Exact. Je lirai peut-être le Ferrari alors !<br /> <br /> <br /> <br />
O
<br /> Effacement de tous ces apports ? Ah bon ! J'ai vraiment l'impression de vivre dans un pays très inclusif au contraire et je kiffe. Je vais vous donner un exemple trivial, et je ne serai pas le<br /> premier à vous le sortir : le couscous est le plat préféré des Français. Bien sûr, ça ne vaut pas vos élégances, et notre mixité, populaire, plus merguez grillées que consommé de Volapuk, n'aura<br /> pas le charme de ces histoires personnelles infiniment caressées, ni de ces postures habiles qui réussissent un apéro-dînatoire dans un appart Quai de Valmy.<br />
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F
<br /> Hum, il faut me connaître pour me supposer des beaux-frères chercheurs aux Amériques et d'autres moscovites. Ma position est simple. N'importe quelle identité est composite, que nous en ayons<br /> conscience ou non de la même manière que le langage de chacun, les actions de chacun mobilisent des éléments composites de notre cerveau. Or, la plupart des débats en France à propos de<br /> l'identité se fondent dans l'identité comme nature à l'image des Etats-nations qui prétendent exister sur leur territoire ancestal avec une population pure, depuis des temps immémoriaux. Et avant<br /> eux, personne.<br /> <br /> <br /> Ce qui est faux pour la France. Mais tout le débat l'ignore ou d'une manière "pauvres immigrés que l'on exclut". Notre langue est une langue construite, créée constamment par des apports variés,<br /> certains sont venus et se sont retirés. Notre culture est construite. Et depuis de nombreux siècles c'est ainsi. Puis est apparu un mode d'inclusion, de penser la langue, la culture comme<br /> effacement de tous ces apports, de tous ces efforts de construction. De la participation de toutes les couches sociales dans ces constructions.<br /> <br /> <br /> C'est juste ce que je dis. Et c'est que je veux montrer par mon exemple personnel et celui de mon épouse. Nous en en souvenons et nous le vivons. Alors que la culture est prise en otage par des<br /> "ayant-droits" qui avancent d'abord leurs titres au lieu de la nouveauté de leurs construction. L'industrie est prise en otage dee la même façon et la plupart des compartiments de la recherche.<br /> <br /> <br /> Quand vous pensez que l'on se bat plus dans certains hémicycles universitaires pour affirmer la différence des domaines, pour interdire leur accès à des chercheurs venus d'ailleurs ou à la<br /> pratique des industriels que pour concevoir des nouveautés avec des apports variés, c'est déjà ne pas comprendre comment se construit la connaissance mais c'est aussi ignorer comme historiquement<br /> ces domaines se sont constitués.<br /> <br /> <br /> Le problème de l'identité de l'Etat n'est pas qu'un problème politique mais il contamine tout le corps social.<br />
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E
<br /> <br /> nous ne suivons probablement pas les mêmes débats. je pense qu'aucun parti en France ne défend la pureté de la population, ce serait assez farce d'ailleurs.<br /> <br /> <br /> votre lien entre une supposée intégrité française et le corporatisme universitaire est ténu mais intéressant. Si vous voulez dire que la pire des choses c'est d'affirmer quelque chose, vous êtes<br /> assez dans ce que signale devereux comme problème de perte d'identité. si vous voulez dire qu'un écoonomiste doit s'intéresser à l'histoire vous avez mille fois raison. Le problème c'est quand on<br /> demande à un économiste d'être aussi historien, artiste-peintre, musicien, sociologue, météorologue et j'en passe. Entre l'ouverture et la di(sso)lution, il y a un juste entre-deux.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
O
<br /> Pour ma part, Filippi, quand je lis ces gourmandises cosmopolites, ces beaux-frères Urugayo-Moscovites et chercheurs aux Etats-Unis, ces ancêtres au passé douloureux-glorieux-ailleurs, ces<br /> adorables neveux et nièces ayant une autre religion, ce détachement vis-à-vis d'un pays qui pourrait être un autre, pourquoi pas ? cet éloge d'un entre-deux nécessairement complexe, subtil et<br /> élégant, je me demande aussi ce que cela recouvre au quotidien. Certitude de soi ? Distinction érigée en art ? Mépris pour celui qui serait d'ici, simplement d'ici ? Ou plus simplement une<br /> abdication habilement présentée en singularité, abdication devant un ordre économique, culturel mais aussi militaire.<br />
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E
<br /> <br /> bonne question.<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> Cette question de l'identité est très intéressante mais chaque fois que quelqu'un en parle, la souligne, questionne son intérêt, sa complexité, son abandon ou au contraire sa revendication, je me<br /> demande la nature de son vécu identitaire. Non pourl 'agresser mais parce que je pense faire partie, seul ou avec mon épouse, de cette minorité en France et peut-être en Europe de l'Ouest, qui<br /> peut revendiquer, si l'on prend l'horizon de la fin du XVIIIe siècle, des ancêtres venant de multiples états et religions. Il est certain que mes ancêtres et ceux de mon épouse viennent de deux<br /> des religions monothéiste et il est probable que j'ai de mon côté des ancêtres musulmans. De toute façon nous avons des nièces musulmanes.<br /> <br /> <br /> A nous deux mon épouse et moi nos racines plongent dans 11 Etats différents qui vont du sud de l'Europe jusqu'en Russie. Nous couvrons toute l'échelle sociale, depuis le journalier mort indigent<br /> dans un hôpital en 1840 et en Algérie jusqu'aux noblesses polonaise, hongroise et russe.<br /> <br /> <br /> Pour échapper à la violence certains de mes ancêtes ont caché leur religion jusqu'à l'oublier si ce n'est en creux, ont tenté d'échapper tant à l'oppresion religieuse que sociale, tandis que des<br /> ancêtres de mon épouse se sont battus contre cette oppression ou ont été assassinés par elle.<br /> <br /> <br /> Alors quand se pose le problème de l'identité française, celle de la France, ou celle de l'Europe nous soupirons. Pour moi c'est un pays exotique, pour mon épouse c'est une quintessence (elle a<br /> plus voyagé que moi). <br /> <br /> <br /> Je ne suis français que par naturalisation plus ou moins forcée. Dans ma famille nous nous en souvenons. Nous avons appris à aimer la langue par exemple et je suis ulcéré de voir que nombre de<br /> gens qui se revendiquent comme "français de souche" ne pensent qu'à profiter jusqu'à l'épuisement des ressources accumulées sans avoir envie de rajouter à ces ressources des nouveautés. Je ne<br /> parle pas de l'argent mais bien de la culture.<br /> <br /> <br /> La langue est détruite ou confite à la "d'Ormesson", le roman n'est qu'un épouvantable galimatias de vieux thèmes éculés, les sciences sociales et humaines tournent en rond excepté quelques<br /> auteurs. Chacun veut le pouvoir non pour générer de l'inexistant mais pour son propre avantage en détruisant tout. <br /> <br /> <br /> La médiocrité est le fin mot de l'histoire et peut-être la fin de l'histoire et elle va avec le convenu.<br /> <br /> <br /> Nous mériterions mieux qu'un Le Pen ou une Le Pen ou une Maréchal-Le Pen, qu'un Fillon ou Coppé, qu'un Hollande même si nous detestions la médiocrité et le convenu. Mais ce n'est pas le cas.<br /> <br /> <br /> Peut-être que la France fait partie de ces pays qui donnent la leçon au monde mais qui ne tire rien pour lui de cette leçon. Nos politiques trahissent tout le monde, à l'intérieur et à<br /> l'extérieur et tout est de la faute des autres, jamais la leur.<br /> <br /> <br /> Mais ni mon épouse ni moi n'avons envie de partir. Alors que ça ne poserait aucun problème. Parce que nous savons que n'importe quelle société et le fait de ceux qui l'ont construite. Alors<br /> s'enfuir pour échapper aux conséquences de nos propres actes, merci bien.<br /> <br /> <br /> Nous sommes Français et Européens et pour moi dans cet européanisme il y a l'entre-deux, les mondes intermédiaires que l'époque moderne a systématique détruit au nom de l'identité.<br /> <br /> <br />  <br />
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E
<br /> <br /> L'entre-deux c'est très bien quand on est dans le domaine personnel. L'entre-deux au niveau politique ça dure peu. Il faut qu'un état puisse définir qui sont ses ressortissants, ses électeurs,<br /> ses contribuables. L'union européenne n'a rien de cela, alors quel les états nationaux ont. transférer toujors plus de pouvoirs à l'UE en les retirant aux états c'est confier à une instance<br /> illégitime de fait, sans autorité, des pouvoirs qui ne seront plus exercés.<br /> <br /> <br /> Aujourd'hui les états membres de l'union européenne sont donc condamnées à vivre de leur passé sans pouvoir se recréer, se poursuivre, ils ne font que prolonger leur erre. La grande-bretagne, qui<br /> est allé le moins loin dans le délire de dépossession de soi (et qui n'a pas été battue en 1940) s'apprête à dire stop. Elle a raison.<br /> <br /> <br /> Pour ce qui est de mes origines, elles sont bireligieuses, françaises, bretonnes, suisses et écossaisses, celles de ma femme sont alsaciennes, possiblement égyptiennes et donc je sais aussi ce<br /> que c'est que d'être de différents endroits. Mais je sais aussi où j'ai atterri !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> "Défaite la moins attendue et la plus brutale de son histoire".<br /> <br /> <br /> Et d'abord , défaite du pacifisme à haute teneur socialiste.<br /> <br /> <br /> Lequel va, du coup, le 10 juillet, au Casino de Vichy, y euthanasier la République.<br />
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E
<br /> <br /> On pourrait tout autant, lisant l'étrange défaite, (quelques citations bien senties ici : http://www.lalettrevolee.net/article-3506635.html), incriminer l'état-major, ou la droite pro-allemande.<br /> <br /> <br /> <br />
G
<br /> Mieux ? pourvoir discrétionaire de juger du praticien ? Ridicule ringard de l'anti-LePen psychotique.<br /> <br /> <br /> Cette dénaturation de l'identité est patente chez les bobos : leur vie et leur "pensée" se résument à "comment ne pas ressembler à un français, si je dis cela est-ce que c'est français ?<br />
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E
<br /> <br /> :-)<br /> <br /> <br /> <br />