Notes et idées : Politique, Bandes dessinées, Polars, Media, Actualité, Europe...
9 Mai 2007
Cette présidentielle a été aussi un passage de relais : pour la première fois depuis 1965, il n’y avait pas de Premier ministre, ancien ou en exercice, dans les candidats du premier tour. Une bonne occasion de faire le point sur les nouvelles figures. Pour faire court et avec une subjectivité totale :
- les traîtres : alors là c’est la fête, de Aurélie Filipetti passant chez Ségolène sans crier gare, à Eric Besson, réfugié chez Sarkozy et rejoint par Claude Allègre, jamais les transferts n’ont été aussi surprenants. A croire que les clivages idéologiques s’érodant, il ne reste qu’une seule question : choisir le bon cheval ;
- Montebourg est out pour un moment, en tout cas il faut l’espérer. Aucune proposition concrète de sa part, en revanche un festival de manifestations étranges : la sortie sur Hollande, principal défaut de Ségolène, le blog François Mitterrand 2007 qui n’a pas dû contribuer à la bonne ambiance dans la campagne, en rajoutant du sel sur les plaies (farci d’attaques ad hominem etc). Et puis, c’est un des ténors du Non, qui a rallié une tenante du oui dès le début de sa campagne, conduisant à escamoter toute question sur le positionnement politique de celle-ci. Il a sacrifié ses convictions (en avait-il ?) à la perspective d’un ministère, ça mérite un peu de purgatoire. J'accroche Montebourg parce qu'avec lui c'est toute une génération de quadras du PS qui a échoué à peser dans les débats, en tout cas vu de l'extérieur ;
- François Bayrou. Il a tenté un pari formidable et passe pas loin du but. Il lui a manqué une réponse claire à ceux qui s’inquiétaient de sa future majorité, et il a souffert des rebuffades du PS la semaine avant le premier tout. Il les avait cherchées en refusant de se prononcer sur son choix entre Sérko et Ségo, alors que toute l'orientation de sa campagne était à gauche. Moralité : il faut assumer sa stratégie jusqu'au bout. Il a perdu en 2007, survivra-t-il ? Ce n’est pas un joueur de poker, sa position exigeante face à Sarkozy et à l’Etat-UMP ne date pas d’hier, il a donc certainement beaucoup d’idées pour se relancer. Il est aujourd’hui suspendu, entre le parti de la droite orléaniste qu’il vient de tuer et une sorte de parti radical rénové que serait un Mouvement Démocrate victorieux. IL repart de zéro, avec des troupes motivées mais inexpérimentées. Je lui souhaite bonne chance, et n’exclus pas, s’il reste aussi attentif à soigner sa gauche, de continuer à voter pour lui ;
- François Hollande : il a été un problème tout au long de la campagne. A croire qu’ayant passé un pacte avec Ségolène en ne se présentant pas contre elle, il avait tenté d’en tirer une sorte de droit de prééminence. Le plus gros clash entre eux a été celui sur les impôts, si bien que l’électeur Royal a été bien en peine de savoir si sa candidate favorisait, ou non, une baisse de l’impôt sur le revenu (la seule excuse de Ségolène sur ce point c’est que la même ambiguïté régnait en 2002 à ce sujet : Jospin président, le choix de Fabius signifiait baisse, celui de Hollande hausse ou statu quo. Mais le choix n’appartenait qu’à l’élu). Hollande a tenté en 2007 de jouer clarté et transparence en annonçant des hausses, mais il l’a fait seul, a nui à la campagne et a sans doute exprimé là son regret de ne pas être lui-même en tête des troupes. Il devrait donc laisser son tour lui aussi et quitter le secrétariat général du PS. C’est d’ailleurs ce qu’il avait annoncé le 23 mai 2006 à Libération : « je quitterai, quoi qu'il arrive, mes fonctions après la présidentielle ». Nous y sommes ;
- L’équipe de Ségolène : ni Dray, ni Bianco, ni Rebsamen n’ont semblé, vu de l’extérieur, encore une fois, apporter quoi que ce soit au débat. Vincent Peillon, son porte parole, a fait une bonne campagne, mais réclame sans doute trop hâtivement le pouvoir pour Ségolène, comme pour conjurer les risques d'être écarté de la suite par son mauvais choix.
- Les blogueurs : je termine sur une touche personnelle. Dans cette campagne, pas mal de passionnés de politique, amateurs passionnés ou semi-pros, dont j’ai apprécié la lecture ou que j’ai lus différemment suite à leurs prises de positions. Petit coup de chapeau à Frédéric LN, de l’équipe Bayrou, notamment pour ses commentaires, à Farid Taha, à l’UDF aussi (qui vient de se faire retirer son investiture, probablement pour avoir appelé à voter Royal), à Radical Chic et à Voter à gauche, dont les répliques n’étaient pas toutes de mauvaise foi et qui ont relevé le niveau de la ségosphère. Je n'aime pas le dernier billet de Guillermo, qui bat sa coulpe sur le dos des électeurs de Sarkozy, mais c'est la vie (je viens de découvrir avec amusement que la partie politique du blogroll de guillermo s’appelle Radical centre, dans laquelle figurent le très modéré Versac, le sarkozyste Koz et le noniste de 1984– après ça Guillermo a passé les dernières semaines à taper sur le centrisme) ; à Koz, qui a tangenté la très mauvaise foi en fin de campagne, à Hugues (Hugues c'est Com-vat-com, c'est la gauche libérale dans toute sa spelndeur, sympathique et intolérante) Jules de What’s Next, toujours là quand on recherche des clichés libéraux documentés ; à Swami Petaramesh, mon indic chez les bovéistes ; à Embruns, phare de la campagne et repère de Guillermito ; à José Féré, très souvent pertinent ; à Guy Birenbaum, tout fou mais sincère et avec de l’humour. .
Impossible de connaître l’impact de tous ces billetistes, sans doute très limité à côté des grandes orgues médiatiques, mais ils ont certainement contribué à des décisions de vote (Swami Petaramesh étant d’ailleurs le seul « influençeur » à avoir été finalement influencé par ses lecteurs, de son propre aveu).
Bon, les aspects people comptent, mais ce ne sont sans doute pas les plus déterminants en politique. Reste donc à savoir, quelles seront, demain, les idées qui feront gagner la gauche.