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1 Mars 2016
La fièvre nationaliste s'est emparée de Yannis Varoufakis. Je lui reprochais, depuis longtemps, de vouloir maintenir son pays dans l'euro, à toutes forces.
Voilà maintenant qu'il entend faire la morale aux tenants du Brexit, dans un billet publié dimanche, avec deux arguments totalement spécieux :
1. Les partisans du Brexit voudraient rester dans le marché commun mais pas dans l'Union européenne. Hors, pour réguler le marché commun, il faut des règles et donc un état européen (l'Union européenne). A mon avis les partisans du Brexit ne s'attachent pas tant au marché commun qu'au libre-échange, et le libre échange est possible hors de l'Union européenne, dans le cadre de l'OMC par exemple.
Par ailleurs, je vois mal l'UE refuser longtemps des accords bilatéraux avec un Royaume-Uni post-brexit. Si le libre-échange est mutuellement avantageux, pourquoi l'UE irait-elle se tirer une balle dans le pied après s'être pris une belle baffe ?
2. Le Brexit signifierait, pour Varoufakis, la fin de l'UE, et la fin de l'UE c'est le retour des années 30. Pour l'économiste, post Brexit, l'UE éclaterait, condamnant la zone Allemagne à la déflation, et le sud de l'Europe à la stagflation. Ce sont deux postulats en réalité, que Varoufakis résume en un seul : il faut admettre à la fois que l'UE ne résisterait pas au Brexit, et qu'ensuite le démantèlement de l'UE serait un cataclysme économique. Pour quelqu'un qui a consacré de longues pages à expliquer la logique démente de l'euro, comme l'a fait Varoufakis, c'est assez acrobatique de convaincre le lecteur que la fin d'un système dément peut être encore plus démente. Ce n'est pas impossible, mais on peut aussi penser que les pays de l'Union rendus à eux-mêmes pourront, chacun, adopter enfin une combinaison de politiques budgétaire, monétaire et industrielle appropriées. C'est un sacré pari sur la nature humaine que d'imaginer que chacun des 27pays de l'Union, post-dissolution de l'UE, s'empresserait de mener les politiques les plus susceptibles de le mener à l'abîme. Par ailleurs, Varoufakis ne dit pas un mot d'une hypothèse tout aussi forte que ce qu'il redoute : que l'Union européenne maintenue s'effondre toute seule, victime de ses politiques ineptes, justement parce que personne n'aura voulu les interrompre, faute d'avoir obtenu l'accord de tous pour en finir.
C'est Schauble qui doit rire en tout cas. Ce que je crois c'est qu'on a, avec Varoufakis, un bon exemple de patriote européen, si l'on est gentil, ou de nationaliste (et souverainiste) européen. Un économiste qui pèse parfaitement ce que coûte à son pays d'origine l'euro et ses disciplines, mais qui préfère les endurer plutôt que de perdre le super-état en cours de création. Et qui n'hésite pas à jouer la politique de la peur. Je préfère à ce discours inaudible celui d'un Boris Johnson, qui dénonce clairement la politique de la peur dont abusent les souverainistes européens.